Je n’étais pas bien vieux
Quatre ou cinq ans, peut être six
Quand on m’a lâché au milieu
De cette agricole oasis
Une île, un no man’s land
Un coin de terre un peu perdu
Où les chiens vivent vingt ans
Loin du tumulte de la rue
J’en ai passé du temps
A jouer, à faire le con
Sous le regard bienveillant
D’une grand-mère de compétition
Un mètre cinquante d’amour
Quarante kilos de gentillesse
Quatre vingt ans dans quelques jours
Depuis elle a changé d’adresse
Les vacances chez mémé
C’est des soirées autour du feu
C’est de la paille dans les cheveux
Et les chaussures un peu crottées
Les vacances chez mémé
C’est l’air pur et la liberté
Un vieux tracteur dans une allée
Et la sieste après déjeuner
On s’faisait des cabanes
Avec du bois et des bouts de ficelles
Sur les branches d’un vieux platane
On se sentait plus près du ciel
On déboulait à fond la caisse
Grimpés sur un vélo sans freins
Gare à la poule qui traverse
Elle sera au menu demain
Qu’ils aient eu deux ou quatre pattes
Je crois qu’on les a rendus chèvres
Les bestiaux n’avaient qu’une hâte
Celle que nos vacances s’achèvent
Elles achevaient et c’est bien triste
La larme à l’œil et le cœur gros
Mémé refaisait nos valises
Pendant que cuisait le gigot
Les vacances chez mémé
C’est des soirées autour du feu
C’est de la paille dans les cheveux
Et les chaussures un peu crottées
Les vacances chez mémé
C’est l’air pur et la liberté
Un vieux tracteur dans une allée
Et la sieste après déjeuner
Quand parfois je m’arrête
Au bout du grand chemin
Près de la boite aux lettres
Qui ne reçoit plus rien
Les souvenirs se pressent
Je revois le gamin
Roulant à fond la caisse
Sur un vélo sans freins
Alors je redémarre
Nostalgique mais heureux
L’écho de ma mémoire
Me ramène en ce lieu
Cette île, ce no man’s land
Ce coin de terre un peu perdu
Où les chiens faisaient semblant
D’être méchant mais qui l’eut cru ?