Les persiennes

La nuit est tombée sur la Brenne
On a refermé les persiennes
Doucement la ville s’endort
Les enfants rêvent à jeudi
Les vieux roupillent comme si
Rien ne se tramait au dehors
Dehors, jetés en pâture
A quelques flics à la dent dure
Huit gamins paumés abandonnent
Pour un petit coin de ciel bleu
Leur innocence dans un aveu
Qui comme une injustice sonne
Le jour se lève sur la Brenne
Mauvaises langues se déchaînent
Et promettent à l’échafaud
Le polak et le communiste
Sous le stylo des journalistes
Naît l’affaire Mis et Thiennot
Fer contre terre, telle est l’histoire
Triste des mômes du cauchemar
Qui du fond de la geôle clament
A la justice, vieille sourde
Qu’ils n’ont pas usé de la poudre
A l’heure où les bourreaux se pâment
Garde s’il n’est pas trop tard
Quand ta raison s’égare
L’esquisse d’un espoir
Qu’au mépris des regards
Evidence fait loi
La vérité viendra
Recolorer le ciel
De Raymond et Gabriel
Bonnes consciences de la Brenne
Ne craignent plus et se souviennent
De ces deux frêles silhouettes
A qui l’on offre des statues
Des noms de squares, des noms de rues
Des frontons de salles des fêtes
Mais que l’on a privées pourtant
D’une vie comme on en fait tant
Loin des tourmentes assassines
Et que d’aucuns sans un remord
Ont abandonné à la mort
Suant dans un manteau d’hermine
Les corrompus, les enrichis
Les commissaires de Vichy
Que l’on décore sans rougir
Peuvent roupiller du sommeil
Du juste sans qu’on les réveille
Les boucs tombent à loisir
Mais combien crèvent en prison
Des Gabriel, des Raymond
Combien dont les cris ne parviennent
Dans la douceur des dimanches
A percer la ferraille étanche
De vieilles paires de persiennes

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